- KOETSU (HON.AMI)
- KOETSU (HON.AMI)Dès 1530, enrichis par le commerce avec la Chine, les grands marchands de Ky 拏to, tout en assumant la direction administrative de leur ville, prirent part à la vie culturelle, s’adonnant à la cérémonie du thé, aux arrangements de fleurs, à la poésie, à la calligraphie. Ils avaient pour clientèle la cour et l’aristocratie et soutinrent financièrement les trois hommes qui, tour à tour, tentèrent d’unifier le Japon et de mettre fin aux guerres civiles. L’opulence de l’époque Momoyama fut favorable aux métiers d’art, et les marchands de soieries, Chaya et Ogata, rivalisèrent d’ingéniosité pour orner leurs riches étoffes.C’est dans ce milieu puissant, mêlé aux élites du jour, que naquit Hon.ami K 拏etsu, descendant de célèbres polisseurs et connaisseurs de lames de sabre, qui jouissaient de la confiance des Ashikaga et de celle de leurs successeurs.Un polisseur de lames de sabreHon.ami K 拏etsu reçut une éducation soignée et, tout en poursuivant le métier de son père, cultiva la calligraphie. Avec Konoe Nobutada et Sh 拏gad 拏 Shoj 拏, il fut l’un des Trois Pinceaux de la fin de l’époque Momoyama au début du XVIIe siècle. Son art se signale par un retour aux calligraphies élégantes de l’époque Heian, célèbres par la beauté cursive de leurs kana . Ce retour à la culture traditionnelle prit naissance dans les milieux aristocratiques de Ky 拏to qui, au cours de cérémonies du thé, avaient pris l’habitude de suspendre dans le tokonoma des fragments (gire ) des plus célèbres calligraphes de l’époque Heian.Jusqu’en 1603, K 拏etsu semble avoir exercé son métier dans l’ombre de son père, tout en cultivant son art et en pratiquant la cérémonie du thé, à laquelle il aurait été initié par Furuta Oribe, disciple et successeur de Sen no Riky .Après le décès de son père et son propre veuvage, K 拏etsu collabora avec un grand marchand de l’époque, Sumi-no-kura S 拏an (1571-1632), à l’impression en caractères mobiles, devenue fort à la mode depuis l’expédition de Corée, de recueils de textes anciens. Il fournissait les modèles pour les caractères chinois et pour les kana et présidait peut-être au choix des papiers aux coloris légers, imprimés de décors de fleurs ou de plantes (kirara ), qui s’inspiraient des papiers chinois utilisés à l’époque Heian, papiers fournis par S 拏ji. Ces saga-bon (du nom d’une propriété que Sumi-no-kura possédait à Saga, dans les environs de Ky 拏to) sont d’un très grand raffinement.Le village de TakagamineEn 1614, K 拏etsu fut présenté par Sumi-no-kura à Ieyasu, qui lui accorda l’autorisation de s’établir avec quelques amis à Takagamine, dans les collines au nord de Ky 拏to. On a souvent parlé de Takagamine comme d’un village d’artisans qu’aurait dirigés K 拏etsu. Tout récemment, une étude du professeur Hayashiya Tatsusaburo, fondée sur l’ancien plan du village où sont portés les noms de ses habitants, a émis l’hypothèse qu’il s’agissait plutôt d’une réunion des membres des grandes familles marchandes de la ville qui, parvenus à l’âge de la retraite, s’étaient réunis pour se livrer à leurs dévotions en toute tranquillité. On sait que K 拏etsu, qui venait de perdre sa mère, fervente adepte de la secte de Nichiren, passa les six premières années de son séjour dans ce lieu à faire élever un sanctuaire en mémoire de la défunte et à réciter des s tra. Il résida dans plusieurs ermitages, le Teiky 拏an et le Tok yusai, appellations qu’il utilisa comme noms de pinceau.Les rouleaux décorésOn ignore quand commença sa collaboration avec Tawaraya S 拏tatsu. Il semble que celui-ci ait épousé une cousine du célèbre calligraphe. Il possédait un atelier de peinture (machi-e ) où l’on fabriquait surtout des éventails. Dès 1605, il avait collaboré avec Suminokura Koan pour lequel il tailla des bois destinés à illustrer un ouvrage imprimé.Il fit le même travail pour certains rouleaux calligraphiés par K 拏etsu mais passa bientôt à la peinture en or et en argent travaillant en symbiose avec le calligraphe qui y transcrivit des poèmes de l’époque Heian (waka ). Le rythme soigneusement étudié du décor et de l’écriture révèle un accord très intime entre les deux artistes, sans que l’on puisse déterminer qui dirigeait l’autre. Le rouleau des Biches du musée d’Atami porte des poèmes du Shin Kokin sh (XIIIe s.) et révèle une compréhension profonde de la littérature ancienne, mais le traitement du décor est profondément moderne. Il en est de même pour le rouleau orné de fleurs de lotus auquel K 拏etsu pourrait avoir ajouté quelques fleurs, mais il avouait lui-même être moins habile en peinture qu’en calligraphie.De nombreuses œuvres sont attribuées aux deux artistes, dont certaines sont probablement dues à leurs descendants.Le potierGrand adepte du chanoyu , K 拏etsu semble avoir profité de sa retraite à Takagamine pour s’adonner à la poterie et créer ses propres bols à thé (chawan ). S’inspirant des Raku (poteries cuites à basse température), œuvres de Ch 拏jir 拏 et de son fils que patronna Sen no Riky , K 拏etsu créa un art très personnel. Il a laissé de nombreux chawan , objets aujourd’hui encore de la vénération des amateurs. Il montait ses bols à la main, portant un soin tout particulier à la «sculpture» (selon l’expression de M. Hayashiya Seiz 拏) des k 拏dai ou pieds qui devaient assurer la stabilité du récipient dans la main du chajin (maître du thé) et de ses invités. Les formes simples sont agrémentées de glaçures à base de plomb aux tons mats et comme feutrés, dont la superposition savante produit des effets inattendus. Une correspondance de K 拏etsu révèle qu’il demandait des ingrédients et des conseils à un membre de l’atelier des Raku et qu’il lui confia parfois le soin de veiller à la cuisson de ses bols, mais ses créations sont originales et personnelles; il leur donna des noms poétiques, tels Sommet nuageux , Nuage de pluie ou Moment pluvieux .L’inspirateur des artisans en laqueLe nom de K 拏etsu est resté attaché à plusieurs laques célèbres mais, de l’avis de spécialistes, s’il en fournit les modèles de décor et de calligraphie qui, moulée dans le plomb, rehaussait les écritoires ou suzuri-bak 拏 , il semble les avoir fait exécuter par les grands artisans de l’époque, les K 拏ami et les Igarashi. L’une des écritoires les plus prisées est Funabashi («le pont de bateaux») où, sur une surface dorée, barrée d’un bateau gravé, s’étend une large bande de plomb dont la tonalité mate contraste heureusement avec la richesse du support. Ces activités si diverses permettent de considérer K 拏etsu comme le fondateur spirituel de l’école Rimpa.K 拏etsu et S 拏tatsu n’eurent pas parmi leurs descendants directs de talents remarquables, mais ils furent les inspirateurs de K 拏rin dont le grand-père, qui avait vécu à Takagamine, transmit à son petit-fils des œuvres de ses amis d’antan.
Encyclopédie Universelle. 2012.